Le premier choc pétrolier marquait au début des années 1970 la fin des années fastes de l'économie que l'on appellera plus tard les trente glorieuses. Il marque aussi l'éveil des français aux risques liées à une surconsommation de pétrole en particulier et d'énergie en général. Parmi les mesures qui seront prises par le gouvernement pour économiser l’énergie, le rétablissement de l'heure d'été est la plus connue du grand public. Pourtant, pour les professionnels du bâtiment, une réglementation jusque là inédite va transformer la manière de construire.

CHRONOLOGIE DES RÈGLEMENTATIONS THERMIQUES

La première réglementation thermique voit le jour le 10 avril 1974 par le décret n° 74-306 du premier ministre Pierre Mesmer. Conséquence directe du choc pétrolier de 1973, la RT 1974 stipule que “les équipements et caractéristiques des bâtiments d’habitation doivent permettre de maintenir au-dessus de 18 degrés Celsius la température intérieure” en limitant autant que possible la dépense d’énergie. À cet effet, les bâtiments neufs résidentiels doivent être équipés d’une couche d’isolation pour limiter les déperditions thermiques et les équipements de chauffage doivent “comporter un système de réglage automatique de température”. L’objectif annoncé de la RT 1974 était de diminuer la consommation énergétique à hauteur de 25% en se concentrant sur les déperditions thermiques.

Le deuxième choc pétrolier de 1979 relance la volonté des autorités de renforcer la législation en vigueur pour diminuer les besoins énergétiques. Trois ans plus tard, le décret n° 82-269 du 24 mars 1982 instaure la RT 1982 en se concentrant sur les réductions de l’énergie consommée par les équipements de chauffage. Avec pour nouvel objectif une réduction de 20% de la consommation énergétique par rapport à la RT 1974, les apports de l’énergie solaire en fonction des zones climatiques du territoire sont pris en compte dans les calculs de déperditions thermiques et des besoins de chauffage. Le Label Haute Isolation créé par arrêté du 4 novembre 1980 est désormais imposé pour tous les programmes immobiliers neufs suivi du Label Solaire en 1983.

L’arrêté du 5 avril 1988 met en place des exigences supplémentaire en joignant les besoins de consommation de chauffage et d’eau chaude avec les déperditions thermiques. Ainsi, la RT 1988 intègre pour la construction d’appartements neufs une limite de déperdition thermique, un système de référence pour le chauffage et l’eau chaude sanitaire et les apports internes de chaleur dus au rayonnement solaire et à l’occupation du logement. La notion de calcul des “performances thermiques globales en matière de chauffage et d’eau chaude sanitaire” est mise en place pour optimiser le rendement des systèmes. Les bâtiments du secteur tertiaire sont également concernés avec des normes incluant les systèmes de ventilation et de climatisation.

Avec la fin de la guerre froide, les années 1990 sont marquées par la prise de conscience au niveau international des problèmes liés à la pollution et aux gaz à effet de serre. Le sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992, qui reste encore aujourd’hui le plus grand rassemblement de décideurs politiques mondiaux avec la présence d’une centaine de chef d’État, confirme la volonté des populations du monde de promouvoir un développement durable. Le protocole de Kyoto de 1997 qui vise à la réduction des émissions de CO2 renforce cette volonté. Dans ce cadre, la RT 2000 met en place des normes visant à améliorer la performance globale des bâtiments neufs par une diminution de 20% de la consommation énergétique des logements et de 40% de celle des bâtiments du secteur tertiaire.

En 2005, la nouvelle réglementation thermique se base sur les obligations de la RT 2000 tout en augmentant les exigences de baisse de 15% de la consommation en énergie des bâtiments neufs et de leurs extensions. En prenant en considération les énergies renouvelables et les différences de consommation en fonction des zones climatiques, la RT 2005 a plusieurs objectifs : tout d’abord la réduction de l’énergie primaire calculée en additionnant l’énergie consommée au compteur et les pertes d’énergie. Le total doit être inférieur à l’énergie consommée par le bâtiment de référence défini par convention. Ensuite un contrôle des températures intérieures durant les mois d’été en fonction des zones climatiques est effectué afin de limiter l’utilisation excessive d’appareils de climatisation durant les fortes chaleurs en été. Enfin les performances thermiques des matériaux de construction notamment au niveau de l’isolation, des apports de chaleurs solaire, de la perméabilité à l’air, de la ventilation, du chauffage, de l’eau chaude sanitaire, de l’éclairage et de la transformation de l’énergie doivent respecter certains critères.

LES PROGRÈS DE LA RT 2012

En 2007, les réunions politiques conduites durant le Grenelle Environnement visaient, parmi les autres mesures environnementales, à réduire les émissions de CO2 en France et améliorer l’efficience énergétique. L’article 4 de la loi Grenelle 1 met d’ailleurs l’accent sur la limitation de la consommation d’énergie primaire dans les programmes immobiliers neufs à 50 kWh/m²/an en moyenne et encourage une évolution technologique pour améliorer les systèmes énergétiques. Dans cette optique, le décret n°2010-1269 du 26 octobre 2010 inaugure la RT 2012 en modifiant l’article R111-20 du Code de la construction et de l'habitation. Les normes mises en places par la RT 2012 concernent la consommation d’énergie maximale pour “le chauffage, le refroidissement, la production d'eau chaude sanitaire, l'éclairage, les auxiliaires de chauffage, de refroidissement, d'eau chaude sanitaire et de ventilation”, la limitation des besoins en énergie et la température maximale en été. Pour ce faire, “les caractéristiques thermiques intervenant dans la performance énergétique du bâtiment” sont fixées ainsi que les températures et les valeurs de consommation énergétiques maximales. Les conditions d'attribution à un bâtiment du label "haute performance énergétique" sont également définies. Ces mesures concernent tous les nouveaux bâtiments résidentiels ou professionnels construits après 2011. En ciblant quatre éléments clés de toute habitation à savoir la ventilation, les déperditions thermiques, la perméabilité à l’air et la surface des fenêtres et des portes, ces normes ont pour objectif affiché la réduction des consommations énergétiques et les émissions de gaz à effet de serre. Elles visent enfin au développement de nouvelles techniques pour améliorer l’efficience énergétique afin de promouvoir, in fine, l'indépendance énergétique nationale. Ainsi, pour les maisons neuves, la RT 2012 impose l’utilisation d’une énergie renouvelable qui peut être la production d’eau chaude par des capteurs solaires ou d’électricité à l’aide de panneaux photovoltaïque.

Avec des exigences réglementaires divisant par trois celles de 1974, la RT 2012 est également une condition sine qua non pour bénéficier des dispositifs fiscaux tels que la loi Pinel pour les investissements immobiliers.

LA RT 2020 : UNE RÉVOLUTION DANS LA CONSTRUCTION

À la différence des premières réglementations thermiques qui avaient pour objectif principal la réduction de la consommation énergétique, la prochaine réglementation thermique de 2020 visera l’instauration des bâtiments à énergie positive. Applicables à tous les bâtiments neufs à partir de 2021, la RT 2020 imposera des constructions pensées et conçues pour produire plus d’énergie qu’elles n’en consomment. Pour atteindre cet objectif, la maison neuve soumise aux normes RT2020 devra disposer d’une isolation intelligente pour optimiser la gestion de l’énergie. L’utilisation de la domotique pour la maximisation de l’éclairage et de la ventilation va également contribuer à la réduction des besoins énergétiques. De même, l’utilisation d’innovations telles que les vitres chauffantes qui permettent de transformer les fenêtres en radiateurs ou des blocs de béton en pierre ponce pour les murs afin de mettre à profit les propriétés isolantes naturelles de la roche volcanique.

En plus d’être une maison passive, c’est à dire autosuffisante en termes d’énergie, la maison neuve soumise aux normes RT2020 devra également produire plus d’énergie qu’elle n’en consomme grâce aux énergies gratuites accumulées à l’aide d’équipements solaires, photovoltaïques et éoliens installés sur le toit, les murs, les fenêtres et les vérandas. Ce supplément d'énergie pourra être revendu au réseau électrique public. À terme, la France disposera donc d’autant de petites centrales électriques à énergies renouvelables qu’il y aura de constructions de logements neufs.

Les bâtiments au normes RT 2020 seront éligibles aux dispositifs fiscaux de loi Pinel puisque celle-ci est applicable pour les logements neufs acquis avant le 31 décembre 2021.

DIFFÉRENCES ENTRE LA RT 2012 ET LA RT 2020

La première différence concerne l’approche vis à vis de la consommation d’énergie : pour la RT 2012, le logement est une entité énergivore qui doit limiter sa consommation à 50 kWh/m²/an. Pour la RT 2020, le logement devient BEPOS donc producteur d’énergie. Ce type de bâtiment à énergie positive devra produire plus d’énergie qu’il n’en consomme en utilisant les toits, les murs et les fenêtres afin de stocker la chaleur et produire de l’électricité. Les matériaux utilisés par le maître d’oeuvre devront être écologiques. La structure du bâtiment devra être en pierre naturelle, en brique, en terre cuite, en terre crue ou en bois. L’isolation devra utiliser des matériaux naturels tels que le chanvre, le liège, la fibre de bois, la ouate de cellulose ou encore la laine de mouton. Les équipements visant à la production de l’énergie incluront la suppression des déperditions thermiques grâce à une isolation par l’extérieur et une excellente étanchéité à l’air. Une ventilation de type puits provençal sera envisagée avec une récupération de la chaleur. Des zones d’ombrage et un dispositif de collecte des eaux de pluie ainsi que l’utilisation de l’épuration naturelle font également partie de l’arsenal disponible pour la production d’énergie.
Ensuite, la RT 2012 considère uniquement cinq facteurs d’utilisation d’énergie : les équipements de chauffage, de refroidissement, de production d’eau chaude sanitaire, d’éclairage et les auxiliaires qui incluent les ventilateurs et les pompes. En plus de ces facteurs, les normes de la RT 2020 incluront quant à elles l’utilisation des appareils électroménagers ainsi que les émissions de CO2 durant la construction.

Enfin, l’appartement neuf étant avant tout destiné à l’individu citoyen, la RT 2020 inclura des nouveaux critères qui prennent en compte le bien-être des habitants en intégrant la qualité de l’air à l’intérieur du logement et l’isolation phonique. L’objectif final étant de sensibiliser les utilisateurs et les rendre non seulement acteurs de l'investissement immobilier mais également producteurs d’énergie grâce à l’évolution des technologies. Cette évolution vise donc à révolutionner le comportement passif des individus et en faire des véritables citoyens de l’énergie renouvelable, aptes à préserver un environnement propre pour les générations futures.